Ezra, graffeur professionnel depuis 7 ans en résidence à l'UBS !
Ezra, graffeur professionnel depuis 7 ans en résidence à l'UBS !Ezra, artiste du collectif Diaspora Crew, a entamé en septembre 2021 une résidence dans les murs de l'UBS. Graffeur professionnel « par passion », cet ancien animateur socioculturel sera présent sur les campus de Vannes, Lorient et Pontivy tout au long de l'année pour réaliser des fresques dans les différents bâtiments de l'Université Bretagne Sud.
Pouvez-vous nous rappeler en quelques mots quelle a été la commande initiale passée par le service culture ?
Le service culture de l'Université Bretagne Sud m'a contacté pour réaliser une résidence sur l'ensemble de ses sites : Lorient, Pontivy et Vannes. Effectuer une résidence signifie réaliser des productions murales, des expositions d’œuvres, des ateliers. Répartis sur 3 sites, mes interventions sont donc concentrées site par site.
Toute l'année est jalonnée d'ateliers, de rencontres, cette démarche itérative vous a t-elle conduite à faire évoluer vos idées de départ eu égard vos créations graphiques ?
Vu le métier que j'exerce, je suis toute l'année dans une posture où je m'adapte. Les commandes de particuliers, de structures scolaires, de mairies ou des festivals sont toutes très différentes donc je suis attentif à bien saisir les envies des "clients".
C'est ce qui fait qu'aucune fresque ne se ressemble. Je ne m'interdis aucune technique pour réaliser des productions afin d'enlever toute barrière qui m'empêcherait d'aller au bout de mon idée. Cela me permet d'être original et d'éviter le côté fastidieux de la reproduction.
Vous-même ancien étudiant, qu'appréciez vous dans les échanges avec la communauté UBS ?
Oui, je suis ancien étudiant de l'UBS. J'apprécie beaucoup les échanges avec les personnels et les étudiants. c'est à la fois très sympa et enrichissant. Par exemple, j'ai eu en parallèle de ma résidence à l'UBS, une commande de la part de la Faculté des Sciences et des Sciences de l'ingénieur pour réaliser des fresques sur leur site. En discutant avec une étudiante, j'ai appris à lire et écrire le codage binaire, ce qui m'a servi pour réaliser ma production et aller encore plus loin dans la liaison entre le fond et la forme. J'ai donc écrit de vrais mots en codage sur cette production. Ce sont ce genre d'expériences qui sont quotidiennes dans mon travail et qui justifient la posture que je vous ai décrit en amont. C'est très stimulant.
Forcément cela se traduit en peinture. J'ai réalisé une fresque sur le mur de l'amphi no2 de la Faculté de Sciences. Mon lettrage (moi) est placé dans une nuée de bulles (représentant l'énergie, la dynamique, le mouvement mais aussi l'élément liquide présent autour et qui participe à l'identité de la ville de Lorient. Ces bulles sortent de 3 lettres : UBS réalisées en blocs de pierre fissurés. C'est ma manière de symboliser ces échanges et l'énergie qu'ils me procurent.
Avoir carte blanche est ce un stress ou une immense liberté ?
En tant qu'artiste, je perçois la carte blanche comme une marque de confiance, d'intérêt pour mes travaux personnels. Je suis donc très fier quand je reçois ce genre de demandes. Je n'y vois pas de stress. Aujourd'hui, les commandes que je reçois sont de cet ordre. Même quand il y a une thématique, carte blanche m'est laissée pour l'illustration.
Très objectivement, c'est parce qu'elles ont vu ou entendu parler de mes productions si certaines personnes me contactent. Donc la carte blanche est logique.
Vous êtes graffeur professionnel, quel à été votre parcours pour monter votre propre entreprise ?
J'ai découvert le graffiti à l'âge de 14 ans dans un magazine et m'y suis intéressé via des magasines mais n'ai démarré sa pratique qu'à l'âge de 22 ans. J'exerçais alors le métier d'animateur socioculturel et les jeunes, que j'accompagnais dans le cadre d'un projet de décoration de leur local jeunes, désiraient le graffer. Nous avons contacté un intervenant et c'est au cours de ce projet que j'ai mis la première fois l'index sur une bombe de peinture. Autant vous dire que j'ai accroché tout de suite.
Au fur et à mesure des postes que j'ai occupé pendant ces 14 ans d'animation socio-culturelle, j'ai toujours organisé des stages et projets autour du graffiti.
Au bout de 4 ans d'ateliers, j'étais en mesure de pouvoir organiser moi-même mes propres ateliers. Forcément, j'ai démarré timidement au début et épisodiquement. Ayant une autre passion chronophage à l'époque: j'étais musicien sur mon temps libre et ai fait des concerts, tournées,disques,... Mais le virus était installé et je me suis mis à travailler lettrages, personnages et décors pour, vers 2004, faire mes premières "sorties" graffiti.
En poste à LORIENT à partir de 2006, j'ai contribué à créer les zones d'expression libre" du port de pêche via le projet d'un collectif graffiti que j'organisais dans la structure où je travaillais.
Puis en 2009, j'ai eu l'idée de créer le festival "Unies Sont Nos Cultures" sur cette même zone.
Ce festival a duré durant 8 ans et a permis d'organiser des fresques conséquentes (murs de 60m de long et 6, 7m de hauteur) mais également de me connecter au réseau graffiti local, régional et national.
2012 : accident du travail et licenciement avec inaptitude. Se pose la question de mon devenir professionnel. Après avoir réfléchi à plusieurs options et consulté mes camarades professionnels de peinture, j'ai créé mon entreprise en 2014. A partir de ce moment, je me suis consacré au graffiti à 100%.
2014 est aussi l'année de la création du Diaspora Crew avec mon frère de peinture, Kaz.
L'idée de ce collectif est de regrouper des peintres amateurs de murs de gros format. Le nombre fait la force et aujourd'hui le collectif regroupe 17 membres, dont 12 pros, répartis sur toute la Bretagne. Nous avons créé un maillage au fur et à mesure des peintures, des rencontres humaines car pour nous les 2 sont indissociables, qui nous permet aujourd'hui de pouvoir répondre à des commandes conséquentes puisque nous avons l'équipe, les savoirs- faire et les moyens techniques. Nous avons chacun notre entreprise mais pouvons nous associer pour les projets le nécessitant. Du coup, nous travaillons ensemble mais nous peignons aussi en "free" ensemble. Cela crée une émulation et donc une dynamique.
Donc mon quotidien graffiti est fait de commandes et de peinture libres individuelles comme collectives. J'insiste sur le plan des peintures libres car ces dernières nous ont permis, et nous permettent toujours, de me, de nous faire connaître d'un public de plus en plus large. Nos peintures à LORIENT nous ont ouvert aux festivals de niveau international en France comme à l'étranger (Allemagne, Italie,...). Plus on progresse, plus on a l'envie de progresser et nous travaillons notre art avec ce souci d'être le plus polyvalent possible et d'associer polyvalence avec technicité.
Autodidacte comme mes camarades, nous avons un regard étudiant sur notre pratique. Nous apprenons tout le temps, ce qui nous évite d'être blasés et nous stimule dans notre dynamique d'efforts.
Mot de la fin sur ces 2 premiers mois au sein de l'UBS ?
Le mot de la fin sera un remerciement à l'équipe du service culture de l'UBS pour son invitation, son accompagnement et aux personnels, étudiants pour l'accueil toujours qualitatif et chaleureux qui m'est réservé. A très vite pour de nouvelles couleurs en coulures.